Les députés étendent les dispositions relatives à l’anonymisation des enquêteurs
Les députés adoptent plusieurs amendements relatifs à la procédure pénale lors de l’examen du projet de loi de programmation pour la justice en séance publique, vendredi 23 novembre 2018.
Les élus votent plusieurs dispositions élargissant l’anonymisation des policiers et gendarmes au cours de la procédure pénale via l’utilisation d’un numéro administratif. Ils maintiennent également, à l’initiative de Jean-Michel Fauvergue (LREM, Seine-et-Marne), la durée maximale d’autorisation des opérations de géolocalisation à quinze jours.
Voici les principales modifications apportées en séance publique par les députés sur le volet du projet de loi de programmation pour la justice relatif à l’enquête pénale, vendredi 23 novembre 2018 :
Anonymisation des enquêteurs (articles 26 bis A et 26 bis B).
L’Assemblée nationale adopte, contre l’avis du gouvernement, un amendement de Nathalie Elimas (Modem, Val-d’Oise) et Isabelle Florennes (Modem, Hauts-de-Seine) instaurant un principe général anonymisation des enquêteurs dans les procès-verbaux de dépôt de plainte ou de main courante. Les policiers et les gendarmes seront alors identifiés "au moyen de [leur] numéro d’immatriculation administrative".
L’anonymisation des enquêteurs était, depuis la loi du 28 février 2017, prévue pour les procédures les plus sensibles (lire sur AEF info). Pour Nicole Belloubet, "l’équilibre établi par la loi du 28 février 2017 [est] satisfaisant". "L’anonymisation est fondée sur un régime d’autorisation", souligne la garde des Sceaux qui souhaitait "préserver l’équilibre du dispositif".
Un amendement de plusieurs élus LREM étend par ailleurs le dispositif d’anonymisation des policiers et des gendarmes à tous les actes de procédures dans lesquels ils interviennent "lorsque la révélation de leur identité est susceptible de mettre en danger leur vie ou leur intégrité physique ou celles de leurs proches". Le gouvernement avait également émis un avis défavorable à cette modification. "L’attentat de Magnanville a mis au grand jour la nécessité de renforcer la protection de ceux qui nous protègent. Il nous appartient d’en tirer les leçons et de garantir cette protection sans entamer le respect de la procédure ni les droits de la défense", justifie Thomas Mesnier (LREM, Charente).
Interceptions des communications, géolocalisation (article 27).
À l’initiative de plusieurs élus LREM, dont Jean-Michel Fauvergue (Seine-et-Marne), l’Assemblée nationale maintient à quinze jours la durée maximale d’autorisation d’une opération de géolocalisation par le procureur de la République. Le gouvernement prévoyait, dans son projet de loi, de réduire cette durée à huit jours. "Il s’agit de simplifier la vie [des enquêteurs] et de permettre d’être efficace à celles et ceux qui sont sur le terrain", affirme Alice Thourot (LREM, Drôme), venant en appui à la proposition de l’ancien chef du Raid.
Techniques spéciales d’enquêteurs (article 29).
L’utilisation des principales techniques spéciales d’enquête est étendue "aux délits les plus graves relatifs aux produits de santé", comme le trafic de substances vénéneuses, ainsi qu’aux "tromperies et falsifications aggravées de produits destinés à l’alimentation" (amendement du rapporteur). "Ces délits requièrent des mesures d’investigation complexes, notamment lorsqu’ils sont liés à l’existence d’un groupement organisé", estime Didier Paris (LREM, Côte-d’Or). Les députés confirment en outre l’extension des principales techniques d’enquête à "tous les crimes" et non plus aux seules infractions relevant de la délinquance et à la criminalité organisées.
Officiers et agents de police judiciaires (article 30).
L’Assemblée nationale précise, sur proposition de députés Modem, que les réquisitions judiciaires adressées par les OPJ aux organismes publics pourront exiger la communication des informations "selon des normes fixées par voie réglementaire". Actuellement, "aucune disposition ne précise la forme que doit prendre la transmission" des données, relèvent les élus dans l’exposé des motifs. "L’envoi de documents sous une forme qui ne permet pas une exploitation informatique (par exemple sous la forme de scans) nuit à leur exploitation par les enquêteurs et mobilise des ressources humaines dédiées à un traitement long et fastidieux."
Numérisation, "oralisation" (article 32 bis).
À l’article 32 bis, portant notamment sur la numérisation de la procédure pénale et l’expérimentation de l'"oralisation" de la notification des droits des gardés à vue, les députés adoptent un amendement de Jean-Michel Fauvergue clarifiant les mesures de placement sous scellé des données recueillies par la Pnif (plate-forme nationale des interceptions judiciaires).
Procédure pénale applicable aux mineurs
Les députés adoptent également, vendredi 23 novembre 2018, un amendement du gouvernement l’autorisant à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de loi pour réformer la justice des mineurs, notamment pour "simplifier la procédure pénale applicable aux mineurs délinquants".
Voici les principales dispositions relatives à l’enquête pénale adoptées par les députés sans modification de fond :
- Possibilité pour une victime de porter plainte en ligne (article 26) ;
- Création d’un régime unique d’enquête sous pseudonyme (article 28) ;
- Présentation facultative de la personne devant le procureur de la République ou le juge d’instruction pour la première prolongation de 24 heures de la garde à vue (article 31) ;
- Extension de la durée de l’enquête de flagrance, élargissement des perquisitions en enquête préliminaire, possibilité pour les forces de l’ordre de pénétrer de jour dans un domicile aux seules fins d’interpeller une personne suspectée d’un crime ou d’un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement, possibilité de fouiller et d’inspecter des navires sur réquisitions écrites du procureur de la République (article 32).